Bilan de Médecins du Monde et Médecins sans Frontières, publié sur le site de Médecins du Monde :
En pleine crise sanitaire, nos organisations médicales humanitaires
tirent le constat alarmant de l’abandon par les conseils départementaux
des adolescents en procédure pour faire reconnaitre leur minorité et
leur isolement. L’hébergement, l’accès aux soins et à la nourriture de
ces mineurs ont plus que jamais reposé sur l’engagement des associations
et collectifs citoyens, sans qu’aucune protection adaptée ne leur soit
proposée par les pouvoirs publics.
Coronavirus : un accès aux soins pour les mineurs non accompagnés garanti par les associations
En pleine pandémie, l’accès aux soins de santé et à la prévention de
ces jeunes mineurs non accompagnés a été garanti par les associations.
Du 15 mars au 15 mai à Paris, Médecins sans frontières (MSF) et Médecins
du Monde (MdM) ont réalisé près de 400 consultations médicales et plus
de 730 consultations psychologiques, en partenariat avec le COMEDE,
auprès de mineurs non-accompagnés (MNA) en recours. Partout, le refus de
reconnaissance de leur minorité par les conseils départementaux a servi
de prétexte aux autorités pour se renvoyer la balle au détriment de
leur santé. En résultent de nombreux signalements par nos deux
associations auprès des autorités départementales et judiciaires
compétentes concernant des risques sanitaires, somatiques ou
psychologiques. Alors que les signalements auprès des conseils
départementaux sont restés sans effet, la justice, saisie par les
associations, s’est prononcée pour le placement et la protection de plus
de 70 mineurs à Paris.
Des mineurs non accompagnés ignorés par l’Etat qui doit les protéger
En dépit des risques sanitaires avérés et des alertes répétées, aucun
hébergement digne et adapté n’a été proposé aux MNA en procédure.
Médecins sans frontières a ainsi financé la mise à l’abri en hôtels de
plus de 170 d’entre eux à Paris, Bordeaux et Marseille. A Paris, 107
autres mineurs auraient passé le confinement à la rue sans
l’intervention des hébergeurs solidaires et des associations Paris
d’Exil, TIMMY – Soutien aux Mineurs Exilés, les Midis du MIE, La Casa et
Utopia 56. Cette dernière a également hébergé une cinquantaine de
mineurs à Rennes et à Tours. Dans le même temps, et dans plusieurs
villes de France, les hébergements concédés par les pouvoirs publics ne
l’ont été qu’après que des avocats et associations aient eu à saisir la
justice. A Paris, l’unique solution d’hébergement proposée l’a été après
six semaines de confinement, dans un gymnase, inadapté aux consignes
sanitaires, et pensé comme un sas pour réorienter ces mineurs vers les
dispositifs pour adultes en situation de précarité. Ainsi, malgré les
effets d’annonce, ce sont des centaines de mineurs qui sont restés à la
rue en pleine crise sanitaire, en dépit des consignes de confinement.
« A Paris, plus de 7 300 repas ont été distribués aux MNA durant le confinement. »
L’accès à la nourriture des mineurs non accompagnés en recours a également été laissé à la charge des associations.
Dans la seule ville de Paris, Médecins sans frontières et Médecins du
Monde ont accompagné 260 mineurs en recours sur les plans médical,
psychologique, juridique et social durant la période du confinement,
auquel s’ajoutent la centaine d’autres suivie par les autres
associations.
En dépit des annonces d’Adrien Taquet, Secrétaire d’État chargé de la
protection de l’enfance, le 22 mars 20201, nos associations de
terrain2, ont constaté qu’une fois encore, les mineurs non accompagnés
en recours ont été ignorés par les départements à qui il incombe
pourtant de les protéger.
Alerter sur la situation dramatique des mineurs non accompagnés en France
Depuis de nombreuses années pourtant, nos organisations, en lien avec
d’autres associations et collectifs citoyens sur le territoire, ne
cessent d’alerter sur la situation dramatique des mineurs non
accompagnés pendant la phase du recours. Ces alertes ont été renouvelées
pendant le confinement auprès des conseils départementaux et, compte
tenu de la dimension sanitaire, auprès de la Direction Générale de la
Santé, d’Agences Régionales de Santé et du Conseil scientifique Covid-19
sans trouver d’écho ni de résolution.
Les personnes se déclarant mineures et isolées doivent être
considérées comme des enfants en danger et donc être protégées comme
tels jusqu’à la décision judiciaire définitive se prononçant sur leur
situation. Cela doit avant tout se traduire par une véritable politique
d’accueil dès leur arrivée en France, reposant sur un temps de répit et
de soins dans le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant.
Ces demandes ne sont ni nouvelles ni inatteignables : elles
constituent le simple respect de la loi française et de la Convention
internationale des droits de l’enfant dont la France est signataire. Les
conseils départementaux sont responsables des mineurs non accompagnés.
Il est temps que cette responsabilité soit pleinement assumée.
Médecins du Monde a ouvert en 2016 à Paris, Nantes et Caen des
programmes dédiés aux mineurs non accompagnés en attente de la
reconnaissance de leur minorité et isolement, leur proposant des
consultations médico-psycho-sociales et un accompagnement dans l’accès à
un parcours de soins. En 2019, l’association a reçu près de 2 000 MNA
sur l’ensemble de ses programmes en France.
Médecins sans frontières est une association médicale humanitaire
internationale créée en 1971 par des médecins et des journalistes. A
Pantin (Seine Saint-Denis), Médecins Sans Frontières a ouvert, en 2017,
un centre d’accueil et d’orientation autour de pôles infirmier, santé
mentale, juridique et social, qui a accueilli plus de 1 600 jeunes
depuis son ouverture. Un centre d’hébergement de 36 lits à Neuilly
Plaisance (Seine Saint-Denis) accueille depuis août 2018 des jeunes
avant leur placement dans les familles d’hébergeurs solidaires du réseau
« Accueillons ». Au total, depuis 2018, près de 400 mineurs non
accompagnés ont été hébergés avec un suivi pluridisciplinaire
(juridique, médical, social, psychologique) par Médecins sans Frontières
et près de 1 000 mises à l’abri d’urgence ont été financées.
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