samedi 30 mai 2020

Le management dans le médico-social (2) : en pleurer...

Billet paru dans les blogs de Mediapart (22/05/2020), par "Docteur BB, Pédopsychiatre en CMPP MONTREUIL", faisant suite au billet Le management dans le médico-social (1): en rire ? 

Voici maintenant le temps des larmes. Les réformes en cours concernant le financement des institutions soignantes véhiculent toujours la même idéologie et les mêmes contraintes : restrictions budgétaires, uniformisation, démantèlement des pratiques, rentabilité… En arrière-plan, la possibilité même du soin institutionnel s’en trouve menacée. Comprenons pour résister!
Après avoir abordé la face risible du management, je voudrais maintenant prendre en compte les répercussions de ces orientations gestionnaires sur les pratiques soignantes, à travers notamment les enjeux du financement… Et là, malheureusement, la comédie sombre dans la tragédie.
Au niveau associatif, les réformes en cours dans le médico-social imposent par exemple des regroupements et mutualisations, sous la forme de CPOM – Contrat Pluriannuel d’Objectif et de Moyens. En principe, il s’agit de créer des fusion d’établissements, en favorisant une mise en commun des moyens et des “ressources humaines”, et en laissant une certaine autonomie dans la gestion des budgets – concernant notamment les éventuels déficits qui seront répartis “en interne”. Avec un peu de recul sur ces évolutions, il semble cependant que les conditions de contractualisation puissent pénaliser fortement les établissements médico-sociaux. En effet, cette « CPOMisation » peut devenir un outil essentiellement gestionnaire, servant surtout à produire du chiffre. Par ailleurs, les associations intervenant dans le secteur médico-social s’inquiètent des modalités de négociation avec l’autorité de tarification, le refus d’accepter certaines contraintes budgétaires étant, potentiellement, assortis de sanctions financières… « Dès lors, il ne restera plus qu’à choisir, dans certaines situations, entre deux maux : encourir immédiatement une sanction financière ou accepter des conditions que l’on sait d’avance incompatibles avec le respect des équilibres économiques du ou des établissements concernés » (Laurent Cocquebert). Sous prétexte de souplesse et de marges de manœuvres accrues, se profile également un contrôle beaucoup plus strict, avec notamment la suppression de toute forme de « reprise » des déficits.
Ainsi, la réforme tarifaire s’accompagne d’un accroissement considérable du risque financier pour les organismes gestionnaires, sans possibilité de négocier la redistribution d’éventuels déficits conjecturaux – tout parallèle avec le désinvestissement de L’État et les politiques d’austérité ne serait que fortuit… Comment gérer d’éventuelles situations de crises avec de telles contraintes – tout lien avec le contexte actuel ne serait qu’une pure coïncidence…? « Sous les apparences du dialogue et de la contractualisation, les nouveaux modes d’allocation budgétaires ne font donc, très manifestement, qu’instaurer un pouvoir unilatéral et sans contrôle aux mains des tarificateurs ». Au-delà de la question du projet, et des moyens concrets à mettre en œuvre, il s’agit surtout de déployer un nouvel instrument de régulation et de contrôle, visant notamment à une « normalisation » et à une uniformisation des pratiques – ce qui signifie en réalité une mise en conformité avec certaines représentations idéologiques dominantes dans les sphères technocratiques, du fait notamment d’un lobbying débridé – voire de conflits d’intérêts patents…
Au final, à travers la mutation des modalités de financement du soin, c’est un dispositif normatif qui est en train de se déployer, sous l’égide des ARS. En arrière-plan, la négociation du « forfait santé » dans le cadre des CPOM va encore accentuer l’éclatement des interventions et le délitement des dynamiques institutionnelles. Les soignants devront, toujours plus, devenir des prestataires de service, mobilisables, interchangeables, sans ancrages ni singularités.
L’UNIOPSS (Union Nationale Interfédérale des œuvres et organismes privés à but non lucratif sanitaires et sociaux) a déjà alerté le ministère de la santé par rapport à la mise en place des CPOM de discorde. En effet, les conditions de contractualisation obligatoire (bel oxymore…) pénalisent fortement les établissements médico-sociaux, en devenant des outils à produire du rendement et des contraintes administratives, avec la menace de sanctions financières à la clé…
Ces évolutions s’inscrivent donc dans la mutation du système de financement au sein du champ médico-social, avec un déséquilibre de plus ne plus accentuée en faveur des instances bureaucratiques de contrôle. Dès lors, il faudra arbitrer entre la peste et le choléra : encourir immédiatement des réductions de moyens – déjà pléthoriques…- ou accepter des conditions incompatibles avec le respect du fonctionnement et des missions institutionnelles…Tout cela sous le prétexte de renforcer la souplesse et l’autonomie des acteurs… Sous les apparences du dialogue et de la contractualisation, les nouveaux modes de financement ne font donc, très manifestement, qu’instaurer un pouvoir unilatéral et sans contrôle aux mains des technocrates, en négligeant la dynamique des finalités, du sens et la réalité des pratiques. Il s’agit donc d’un nouvel instrument de régulation, ayant comme objectif le contrôle des moyens et la mise au pas des établissements, en nivelant au passage le droit des salariés. En effet, les conventions collectives des établissements regroupés dans les CPOM ne seront plus opposables aux décisions et pratiques de ces nouvelles entités juridiquement distinctes…
Au final, les objectifs managériaux sont toujours les mêmes : optimisation des financements, évaluations quantitatives, privatisation de l’offre, prestations centrées sur la personne, au détriment de la solidarité collective, du soin, et du travail institutionnel. Ce sont évidemment les situations cliniques et sociales les plus complexes qui vont en pâtir, toutes celles qui ne bénéficient pas d’une représentation auprès des administrations et qui ne rentreront pas dans les catégorisations arbitraires et réductrices des « usagers » bénéficiaires, telles que définies dans les hautes sphères sans prise en compte du « terrain ».
Ainsi, la réforme SERAFIN PH (Service et Etablissements Réforme Adéquation FINancement-Personnes Handicapées) s’insinue d’ores-et-déjà dans le fonctionnement des établissements médico-sociaux, avec comme finalité plus ou moins avouée de transformer ces institutions spécialisées en plateformes de prestations et de services. En l’occurrence, il s’agit effectivement de fonder le financement sur « l’objectivation et la liaison entre les besoins des personnes accompagnées et les réponses qui leur sont apportées ». De fait, il faudrait désormais pouvoir proposer un « panel » de services externalisés, dont dépendront directement les financements, sur le mode d’une tarification à l’acte – dont on a pu mesurer la réussite indéniable au niveau hospitalier…surtout pour les structures privées lucratives…
Derrière le mot d’ordre de « Transition inclusive », il faudra donc être concurrentiel, audacieux, pour remporter la course à la prestation sociale et empocher les appels d’offre. Les liens soignants vont ainsi devenir des prestations économiques, avec à la clef un délitement du sens des engagements, une dégradation de la qualité de travail, une perte de la dimension collective du soin… Et au final, un risque non négligeable quant à la qualité de l’accompagnement des « usagers », et une menace d’exclusion des publics les plus précaires et vulnérables…
Pour Sophie Cluzel, secrétaire d’Etat en charge du handicap, il s’agit prioritairement de cibler un « modèle tarifaire hybride, à 360 degrés, structuré à partir des choix de vie des personnes ». Ce modèle mixte devrait reposer à la fois sur la « solvabilisation » des intéressés à travers un « droit personnalisé à prestations » et sur le financement de l’Etablissement médico-social, selon un socle négocié avec chaque opérateur sur la durée du CPOM. Au final, la part « variable » du financement dépendra de la capacité des institutions à proposer des services adaptés à leur clientèle, sur un modèle consumériste de l’offre et de la demande…Quant aux sans-voix, à ceux pour qui il est justement difficile d’exprimer une demande, du fait de leur situation psychique, sociale, culturelle, quelle place auront-ils dans un tel dispositif ?
Sur le plan théorique, il est bien beau de vouloir renforcer l’autodétermination des personnes en situation de handicap. Mais que faire des situations dans lesquelles le handicap vient justement entraver, en amont, les capacités concrètes d’autonomie ? Ne s’agit-il pas de mettre la charrue avant les bœufs – ou alors, plus prosaïquement d’exclure ou d’instrumentaliser les publics les plus fragiles. Car c’est bien une logique de dérégulation par le jeu libre du marché qui se profile, avec toutes ses dynamiques de profit / relégation.
Comment « renforcer le pouvoir d’agir de chacun » face à un tel processus d’éclatement, de déstructuration, d’isolement, tant des soignants que des personnes en besoin d’assistance ?
Le travail institutionnel permet justement d’élaborer en équipe, avec un regard croisé, pluridisciplinaire, parfois contradictoire, les situations cliniques, sans postuler d’emblée que la personne « demandeuse » – si tant est qu’il y ait une demande… – sache ce dont elle aurait besoin.
Le contraire reviendrait à postuler une transparence totale avec soi-même et une connaissance instantanée de état de « l’offre » sur le « marché », à la façon d’un actionnaire cherchant à faire fructifier son capital. Manifestement, il s’agit là du modèle néolibéral de l’autoentrepreneur, de l’actionnaire de soi, sans conflictualité, sans ambivalence, sans zones d’ombre…Sans limitation dans le déploiement de son savoir sur lui-même et sur la nature de son désir…Autant dire, une pure fiction idéologique, particulièrement problématique dans le champ du handicap psychique….
Le financement à la personne, au détriment de la dotation des institutions risque donc d’aboutir à une marchandisation du secteur avec un détournement vers le privé lucratif, à une accentuation des inégalités socio-territoriales, voire à une limitation de l’accès aux soins, du fait de restes à charge élevés pour les usagers…
La secrétaire d’Etat voit dans ce choix d’un modèle « Financement à 360° » la possibilité de valoriser, pour les Établissements Médico-Sociaux, « les missions de coopération, la fonction d’appui au droit commun, de coordination des parcours complexes, et le niveau de compétences et d’expertises rassemblées au sein du plateau technique » : un beau vernis de novlangue pour nommer ces plateformes de parcours et de services, c’est-à-dire une offre de prestations désarticulées, sans ancrages ni temporalités, sans cohérence…
Il va de soi que ces transformations institutionnelles se feront de manière contraignante, à travers ce qui, dans le langage managérial, est pudiquement nommé des « leviers incitatifs ». Traduction : soit vous vous soumettez volontairement, soit vous n’êtes plus financés…
Cependant, dans le cadre de l’évaluation de l’activité en vue d’un financement spécifique des actes, la question des critères tant quantitatifs que qualitatifs, du temps passer à coter, des limites, des zones d’ombre, reste tout à fait insondable…
Faut-il alimenter de façon exponentielle l’insatiable hydre bureaucratique de données qu’elle digère et néantise aussitôt ? Faut-il ainsi donner en pâture tous ces débris d’activité, pour remplir sans cesse ce véritable tonneau des danaïdes – sachant que toutes ces évaluations finissent dans des tiroirs, dès lors qu’elles ne sont pas maniées à des fins de remise à l’ordre ?
Si l’on voulait vraiment dresser une représentation réaliste et complète d’une activité clinique, on en viendrait à créer une superposition exacte, une reproduction à taille réelle de la pratique concrète, à l’image du texte de Jorge Luis Borgès sur la Carte et le Territoire : « En cet empire, l’Art de la Cartographie fut poussé à une telle Perfection que la Carte d’une seule Province occupait toute une Ville et la Carte de l’Empire toute une Province. Avec le temps, ces Cartes Démesurées cessèrent de donner satisfaction et les Collèges de Cartographes levèrent une Carte de l’Empire, qui avait le Format de l’Empire et qui coïncidait avec lui, point par point »…
On voit bien ici l’aporie, le caractère irréaliste, démesuré, d’une telle entreprise d’évaluation – à partir du moment où elle ne prend pas en compte les enjeux cliniques spécifiques auxquels se trouvent confrontés les acteurs du soin.
Comme le souligne, Julien Vernaudon, « la Haute Autorité de Santé, regorge d’imagination pour nous dégoter d’inutiles, ineptes et chronophages critères qualité ». Au niveau hospitalier, on peut ainsi dénoncer « la spirale inflationniste de ces critères, dont l’expansion semble très vraisemblablement en lien avec un impératif de justification des postes de leurs inventeurs et de ceux qui sont censés les contrôler. Des services entiers dits de « qualité » avec des « qualiticiens » (novlangue managériale) ».
Faut-il transférer ce type de dispositif à l’ensemble des activités soignantes?
De fait, il s’agirait d’une véritable « transformation de tous les événements en information pure » (Jean Baudrillard), avec l’écueil que, dans cette « hyper-réalité », « les choses perdent leur distance, leur substance, leur résistance ».
En pratique, toute réduction suppose une simplification, la mise en relief de tels ou tels critères, et l’oubli dans l’ombre de tels ou tels autres…
Et, inévitablement, ce sont les aspects « productivistes » qui vont ressortir, au détriment de toute les dimensions plus informelles – mais essentielles- du soin.
Bien loin des revendications de neutralité, toute évaluation porte en germe une idéologie plus ou moins consciente, des schémas plus ou moins avoués de la pratique soignante ; ainsi qu’un risque d’uniformisation, négligeant complètement les singularités et les dimensions qui ne seraient pas prises en compte dans la grille évaluative – c’est-à-dire la clinique…
Faut-il donc ajouter une charge de travail administratif aux soignants, emboliser leur activité clinique, sachant que cela n’aboutira de toute façon qu’à une vision orientée, partiale, tronquée, mutilée, désincarnée, décontextualisée, déshumanisée, de leur « activité » ? Faut-il sacrifier notre investissement de soignant, notre temps auprès des patients, sur l’autel d’un fantasme : la possibilité de ne prendre en compte et de ne financer que le besoin réel des personnes et d’en connaitre exactement les coûts ?
Le dispositif SERAFIN-PH est ainsi construit à cette fin chimérique : imposer une « nomenclature sur les besoins des personnes handicapées et sur les accompagnements apportés en réponse aux besoins », c’est-à-dire transposer la T2A (tarification à l’acte) dans le champ du médico-social.
Petit rappel de Julien Vernaudon : « depuis la T2A, il faut gérer l’hôpital comme une entreprise. Comme seule ce type de gestion peut être effectuée par des gestionnaires, plus question de laisser la gestion et même la décision de la stratégie aux soignants, on les consultera, et uniquement les médecins via la Commission Médicale d’Etablissement. Mais la décision in fine est administrative. L’entreprise doit être rentable avec un budget qui doit être au pire à l’équilibre et au mieux excédentaire ».
Par ailleurs, sur le plan plus théorique, on perçoit bien la dimension abstraite d’essentialisation de ce type de procédures, comme si nommer le Handicap – avec déjà toute la dynamique aliénante que cela suppose – suffisait à définir des Besoins univoques et des Accompagnements stéréotypés. Exit le sujet, ses ambivalences, ses singularités, ses refus, sa conflictualité, son histoire, ses espoirs…
Comme le dénonce Marie Bakchine, « la logique est la suivante : financer des actes sans tenir compte des facteurs humains et des espaces de pensée considérés comme improductifs ». Au fond, « il s’agit à terme de mettre en concurrence les établissements, de promouvoir ceux qui pratiquent les tarifs les plus bas, tout en réduisant de manière artificielle et insatisfaisante des listes d’attente de plus en plus longues du fait d’une politique de santé qui veut soigner à moindre coût ». « Dans ces réformes bureaucratiques, le soin a disparu au profit de l’accompagnement, mot valise qui réduit le travail à un acte technique ». 
Pour les technocrates, à une intervention chirurgicale ambulatoire peut être assigné un tarif plus ou moins fixe ; ce qui, effectivement, ne parait pas abusif. Par contre, faut-il les suivre lorsqu’ils appréhendent le « coût » moyen de prise en charge d’un Diabétique, d’un Schizophrène ou d’un Autiste ? Outre l’aspect économique et gestionnaire très approximatif, dans quelle mesure une telle représentation homogénéisante vient-elle modifier les pratiques soignantes ? S’agit-il d’accompagner des personnes ou des Entités abstraites ?
N’y a-t ’il pas quelque chose d’éminemment paradoxal dans le fait de prôner à la fois une personnalisation des financements tout en installant un système d’évaluation et de tarification aussi uniforme que réducteur et désubjectivant ?
A travers la clinique et le collectif, les dynamiques institutionnelles ne sont-elles pas justement les mieux situées pour appréhender les irréductibles singularités, en soutenant concrètement des mouvements de subjectivation et d’autonomisation ?
Faut-il défaire ces espaces de rencontres, d’émergences, d’ouvertures, d’épaississement, de croisement, de densité, de durée, en faveur d’une évaluation aussi abstraite qu’absconse, aussi éthérée que fallacieuse ? Où se situe la personne : dans la temporalité longue des liens, ou dans l’immédiateté d’une grille ?
Pour l’idéologie bien-pensante à la sauce néo-libérale, l’institution enferme, et il faut donc libérer les personnes de ces carcans, c’est le seul mot d’ordre – sans aucune arrière-pensée, évidemment, en termes de restrictions budgétaires… Or, tout l’enjeu du travail institutionnel consiste justement à reconnaitre le sujet dans sa singularité, dans une perspective d’émancipation et de réappropriation qui en passe par du collectif. Postuler d’emblée la personne comme souveraine témoigne d’une méconnaissance affligeante des dynamiques de subjectivation, inscrites dans l’altérité et la groupalité, qui plus est en situation de handicap psychique…
Voici donc le type d’injonctions ou de slogans qui vont s’imposer aux praticiens : « La construction de réponses modulaires, personnalisées et inclusives facilitant un parcours de vie plus fluide des personnes accompagnées impose que les systèmes d’information répondent techniquement à l’ambition de décloisonnement du secteur médico-social avec les secteurs social et sanitaire et avec les acteurs de droit commun ».
Des mots d’ordre nébuleux qui, sous prétexte de libération des personnes, n’aboutiront qu’à une libéralisation de « l’offre » thérapeutique, à une quantification ouvrant à une tarification systématique et à une mise en concurrence, à une dispersion sur le mode de plateformes de prestations potentiellement privatisés et lucratifs…
A quelles compromissions s’expose-t-on à force de vouloir systématiquement harmoniser la langue entre l’expérience clinique et les critères évaluatifs bureaucratiques ?
Traduttore, traditore… Il y a des instruments qui détournent les pratiques, empêchent toute subversion ; et qui risquent de détruire insidieusement le sens même de nos engagements de soignants.
Comme le souligne Charlotte Herfray, des modifications dans les manières de parler sont souvent révélatrices de modifications dans les façons de penser (…). Toute langue est aussi véhicule d’idéologies (croyances collectives). Dans les discours qui constituent notre environnement, des « novlangues » se font jour et certaines « novlangues » qui gagnent du terrain fonctionnent comme un « cheval de Troie » qui vient coloniser nos esprits“.
Ainsi, le modèle entrepreneurial et managérial tend à infiltrer le langage, les actes, les missions, les expériences, les horizons : les technologie numériques s’insinuent dans les pratiques, les “experts métiers formés en handicap” remplacent les équipes cliniques, la gouvernance par l’appel à projets ou par l’innovation par le design social remplace les projets institutionnels de soin…De plus en plus le « cadre opérationnel » des établissements doit devenir comparable à celui d’une start-up, des applications mobiles sont mises en place pour exercer du coaching et pour élaborer des indicateurs, etc.
Au final, « un véritable carcan technocratique empêche toute possibilité de retournement du pouvoir par une colonisation de l’imaginaire des médecins hospitaliers  grâce à un dispositif, au sens de Foucault, permettant une gouvernementalité (toujours Foucault) très efficace. Ce dispositif est diffus, complexe et s’appuie sur toute une série d’outils qui s’accumulent de manière exponentielle chaque année et segmentent l’appréciation de l’activité de soin en autant d’objectifs précis à atteindre. Ces outils finissent par nous faire oublier qu’ils sont devenus une fin et non un moyen, fonction anormalement inverse d’un outil » (Julien Vernaudon).
De fait, cette logique comptable tend à infiltrer et à détourner tant les représentations que les actes des soignants : « notre imaginaire en vient totalement à être colonisé par ce vocable et ces concepts artificiels qui nous sont imposés. On en vient à penser dans la langue de l’oppresseur ».
De façon concomitante, la réforme du financement de la psychiatrie se déploie également dans le champ sanitaire, avec la poursuite des travaux visant à mettre en place d’ici juin 2020 les décrets d’application de la sous-section 4 de l’article 34 de la loi de financement de la sécurité sociale.
Comme dans le champ médico-social, cette réforme risque de mettre à mal les institutions basées sur la pluridisciplinarité et soutenant des prises en charge sur le long terme, à destination de personnes ne pouvant bénéficier d’une simple inclusion en ambulatoire, du fait de la complexité de leurs situations.
En effet, ce nouveau mode de financement passe d’une dotation globale, la « dotation annuelle de financement » à une dotation par compartiments. Elle ne sera plus fixe pour chaque établissement, ce qui permettait jusque-là une prise en compte globale des activités cliniques et thérapeutiques, en préservant des marges de manœuvre pour les équipes. Désormais, les dotations dépendront de certains critères dont par exemple la file active, sur la base de 15% du financement. Pour certains établissements, type Hôpitaux de Jour, recevant des patients sur de longues séquences de soins, cela constitue un dévoiement manifeste de leurs pratiques, voire une menace par rapport à la pérennité de leur cadre, avec, au final, une réduction significative des moyens humains. En effet, pour garantir le financement, il faudrait voir toujours plus de patients, au détriment de la qualité des soins et en favorisant les interventions ponctuelles, voire de mauvaise qualité. Car, les établissements qui « perdent de vue » les patients, sans se soucier de la continuité, de l’alliance, des perspectives de suivi sur le temps long, seront finalement privilégiés et sur-dotés – ce qui en pratique correspond à la mode des centres experts, évaluant à la chaîne sans assurer le suivi… Étrange conception du soin, tant sur le plan de la qualité des prestations que des aspects proprement économiques…. En prenant en compte la file active comme critère déterminant, le nouveau modèle de financement favorise effectivement des approches à court terme ainsi que le renouvellement rapide des patients pris en charge. Ce qui, du point de vue de politiques sanitaires durables, constitue une aberration. Il faudrait donc intervenir ponctuellement, de façon uniforme, en ciblant préférentiellement les pathologies susceptibles de telles interventions…Un vrai lit de Procuste…. Autant dire que l’on va laisser se dégrader les situations complexes, tant sur le plan psychopathologique que social, en entravant des possibilités concrètes d’autonomisation, ce qui aura évidemment un coût au niveau individuel, mais aussi pour la collectivité sur la durée…Et, ces personnes délaissées, voilà ce qui leur sera proposées : un enfermement à domicile, un confinement inclusif, avec quelques prestations sans cohérence, organisées à partir de plateformes expertes – et sans doute, des prescriptions médicamenteuses, ou des programmes lucratifs de remédiation….

Non, décidément, on a beau essayer d’en rire, ce sont surtout des larmes d’amertume qui surgissent… De manière insidieuse, sous prétexte de modernisation, les fondements du soin institutionnel se voient sacrifiés, toujours plus, sans vergogne… Et nos bons réformateurs, drapés dans leur conviction du Bien et du Progrès, sont en train de détisser toutes les protections qui ont notamment permis d’éviter certains drames individuels pendant la crise épidémique. Jusqu’à où allons-nous, soignants, citoyens, supporter cette morgue et ce mépris ? Dans quelle mesure l’acceptation passive devient-elle allégeance ou complicité ? A chacun d’en décider…

mardi 26 mai 2020

La lutte paie à Korian !

Le 25 mai, plus de 80 EPHAD du groupe Korian étaient dans la lutte pour exiger le versement de la prime de 1500€ promise par Macron. La mobilisation a été tellement forte que le soir même les salarié-es étaient entendus. Pour la CGT, ce n'est pas fini. Bravo aux salarié.e.s !
Retrouvez l'interview de notre camarade Albert Papadacci, DSC CGT du groupe :

lundi 25 mai 2020

La « solidarité » vue par la direction du CEP de St Papoul


Quel mépris !
La « solidarité » vue par la direction du CEP de St Papoul

Deux salariées de l’établissement viennent de comprendre le sens du mot « solidarité » si souvent utilisé par notre direction.
Qu’en est-il de cette « solidarité » lorsque l’on remet à une salariée en situation précaire une feuille de salaire qui indique un montant total de quelques dizaines d’euros ? Et pour la deuxième un montant de…zéro euros ? Quel scandale, quelle honte ! A quand une fiche de salaire à montant négatif ?

Notre Président de la République, notre Direction Générale, la CSSCT (Commission Santé, Sécurité et conditions de Travail) présidée par la directrice de l’établissement, n’avaient-ils pas recommandé une vigilance accrue pour le maintien des salaires durant la période de confinement lié au Covid19 ?
Comment peut-on avoir bonne conscience en laissant émarger un salarié à zéro euros ? Quelle direction est capable d’une telle injustice ? D’un tel traitement de ses salariés ? Voilà comment sont remerciées des salariées qui, dans le même temps, sont reconnues et félicitées pour la qualité de leur travail et de leur engagement.
Ce management est d’un autre âge, et indigne des valeurs d'humanité de l'économie sociale et solidaire.

Quelle qu’ait pu être cette situation, il est du devoir d’une direction de maintenir le salaire d’un employé (qui plus est en contrat précaire) pour lui éviter une catastrophe en fin de mois. Quitte à mettre en place certaines solutions à postériori.

Le CEP Saint-Papoul, paradis de la solidarité
Le CEP Saint-Papoul, berceau d’« ANRAS solidarité »
Comment en est-on arrivé à un tel mépris des salariés ???
Il reste donc une bonne marge de progression afin que la solidarité et la bientraitance retrouvent tout leur sens dans ces pratiques managériales.

    Le syndicat CGT de Saint-Papoul veut exprimer toute son indignation face à de tels agissements ainsi que celui de nombre de salarié.e.s choqué.e.s de la manière dont leurs collègues sont remerciées du sérieux dont elles font preuve au quotidien.
Nous exprimons toute notre « véritable » solidarité et notre indéfectible soutien à ces collègues et les assurons que la direction de l’établissement devra rendre comptes de cette injustice.
Nous exigeons le règlement intégral et immédiat du salaire de ces deux collègues ainsi que des excuses pour ce préjudice. Et nous porterons une vigilance particulière à ce qu’elles soient maintenues dans leur emploi par renouvellement de leurs contrats de travail car aucune faute professionnelle ne leur a été signifiée.



dimanche 24 mai 2020

La circulaire budgétaire médico-sociale maintient le cap et intègre la variable Covid-19

Pour info, via hospimedia

L'impact du Covid fait réhausser la programmation budgétaire de plus d'un milliard d'euros
Inscrite dans le contexte de crise du Covid-19, la circulaire budgétaire médico-sociale pour 2020 a été remaniée pour répondre aux besoins financiers du terrain. Primes, compensation des pertes... les mesures devraient pouvoir intervenir dès juillet.
Soumise à concertation jusque ce 20 mai, la version provisoire de la circulaire budgétaire médico-sociale dont Hospimedia a eu copie cadre les crédits exceptionnels alloués aux structures pour faire face aux impacts de gestion de la crise sanitaire du Covid-19. Aux "mesures de sécurisation financière immédiates" prises pendant la crise pour "soutenir la continuité de fonctionnement et d'accompagnement" des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESMS), s'ajoute 1,3 milliard d'euros de crédits complémentaires.
Reposant initialement sur un taux de progression de +2,66% de l'objectif global de dépenses (OGD) intégrant une évolution de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) médico-social de +2,19% et un apport sur fonds propres de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) de 237 M€, la campagne budgétaire 2020 a vu ses sous-jacents budgétaires réévalués. L'OGD affiche ainsi une hausse de 1,25 Md€ dont 981 millions d'euros (M€) sur le secteur personnes âgées et 264 M€ sur le secteur handicap. Des financements "exceptionnels, non reconductibles", qui sont complétés par une réduction de la contribution du médico-social aux mises en réserves destinées à garantir l'exécution de l'Ondam. Initialement fixée à 154 M€, la contribution est réduite à 28 M€. De quoi flécher quelque 126 M€ supplémentaires pour le champ du handicap.
Primes : modalités encore "en cours d'élaboration"
Comme annoncé par le Gouvernement, 750 M€ de ces crédits viendront financer la prime Covid-19. Ce à hauteur de respectivement 506 M€ et 244 M€ sur le secteur du grand âge et le volet handicap. D'un montant de 1 000 €, la prime sera portée à 1 500 € dans les départements les plus touchés — soit 40 départements, contre les 33 annoncés le 7 mai dernier par le ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran (lire nos articles ici et là).
Alors que les conditions d'octroi pour le secteur sanitaire viennent de sortir (lire notre article), il faudra encore attendre pour connaître celles applicables sur le secteur médico-social. Celles-ci, précise le document, sont actuellement encore "en cours d'élaboration" et devraient faire l'objet d'une instruction complémentaire. Les ARS seront alors invitées à lancer une enquête auprès des structures pour déterminer le montant des crédits nécessaires avant de disposer d'un éventuel solde en fonction des remontées de terrain.
Une enveloppe de crédits non reconductibles nationaux viendra également "apporter un soutien financier complémentaires [...] aux ESMS confrontés à d'importants surcoûts générés par la crise". Annoncée à 475 M€ pour les Ehpad, cette rallonge est finalement fixée à 511 M€ avec deux sous-enveloppes fongibles.
Des versements "dès juillet"
Malgré une progrogation de quatre mois des délais de la campagne budgétaire, le Gouvernement rappelle l'importance pour les ARS d'agir au plus vite. Ces dernières sont invitées "à prioriser les gestionnaires qui auraient un besoin urgent de crédits" et à concentrer leurs actions sur les ESMS les plus impactés par les effets de la crise, "quitte à simplifier les procédure budgétaires pour les ESMS les moins impactés". Et d'appeler "à prioriser les étapes" pour que les ESMS "obtiennent dès juillet les financements nécessaires" à la prime Covid, la prime grand âge et la compensation des pertes de recettes d'hébergement des Ehpad. Un versement en une fois de ces crédits est actuellement à l'étude par la CNSA.
Surcoûts : trois postes pris en charge
231 M€ viendront de fait compenser les surcoûts exceptionnels des Ehpad et des services de soins infirmiers à domicile (Ssiad). Selon l'annexe 9 du projet de circulaire, ces crédits visent à compenser les charges exceptionnelles liées au renfort de personnel en Ehpad et en Ssiad, "quel que soit leur statut juridique" dès lors qu'ils ont recruté des CDD, eu recours à l'intérim ou engagé des heures supplémentaires pour renforcer leurs équipes.
Le surcoût de l'absentéisme dans les Ehpad et Ssiad publics sera également pris en compte, ces derniers ne bénéficiant pas d'indemnités journalières pour leur personnel titulaire. Pour ce faire, les ARS sont invitées à accompagner les structures "les plus fortement impacté[e]s" en prenant en charge la part du taux d'absentéisme supérieure au taux constaté en 2019.
Enfin, seront également pris en compte les surcoûts liés aux autres charges d'exploitations, comme les achats de matériels, d'équipements de protection individuelle, de fournitures médicales mais aussi les investissements engagés pour l'aménagement temporaire des locaux. Cette compensation des surcoûts devra néanmoins pendre en compte les économies générées par la sous-activité constatée pendant la période, souligne l'exécutif. Le secteur handicap bénéficiera quant à lui de 20 M€ de crédits non reconductibles pour les surcoûts immédiats liés aux renforts de personnels et à l'achat de matériel indispensable.
280 M€ pour les pertes de recette
La seconde sous-enveloppe, fixée à 280 M€, viendra par ailleurs soutenir "les Ehpad qui connaissent une baisse considérable de leurs recettes d'hébergement" du fait de la suspension des nouvelles admissions et de la fermeture des accueils de jour. Concédant à des pertes de recettes parfois "très conséquentes", le Gouvernement entend ainsi "éviter une hausse des tarifs hébergement des Ehpad dans les mois à venir". Les Ehpad et les accueils de jour autonomes ou adossés à un Ehpad pourront ainsi prétendre à une compensation maximale de respectivement 65,74 € par journée d'hébergement et de 30 € par jour et par place non occupée. Ce, "quel que soit leur statut juridique". Basée sur des estimations, cette enveloppe est amenée à être complétée, notamment par des crédits non reconductibles régionaux.
En cas de mise au chômage partiel des salariés, les structures feront néanmoins l'objet d'attentions. "Ce recours au chômage partiel, précise le projet de circulaire, ne doit pas avoir pour conséquence un gain financier à la suite du financement par l'État d’une partie de leur masse salariale alors que leurs dotations ont été maintenues." En cas de surcompensation des pertes de recettes par le financement du chômage partiel des employés, les ARS devront assurer un "rééquilibrage" par des reprises de financement, sous forme de réduction de dotation notamment. Des vérifications en clôture de l'exercice budgétaire 2020 pourra donc conduire à des ajustements de dotations en 2021.
Pertes de recettes : quelles modalités de calcul ?
Pour l'hébergement permanent et temporaire, cette compensation couvrira les pertes de recettes constatées pendant la crise par rapport aux recettes d'hébergement moyennes mensuelles constatées en 2019. Ce, "à due concurrence du taux d'occupation moyen de l'établissement constaté en 2019, dans la limite de 90%". Le montant de 65,74 € par jour est calculé sur la base d'un tarif d'hébergement journalier de l'Ehpad médian de 60,22 € auquel s'ajoute un ticket modérateur de dépendance Gir 5-6 de 5,52 €. La compensation du manque à gagner sur l'accueil de jour est quant à elle calculée sur la base du taux d'occupation moyen mensuel constaté en 2019, dans la limite d'un taux d'occupation de 60% et sur la base d'une ouverture hebdomadaire de cinq jours maximum.
Handicap : 15 M€ pour les solutions de recours
La crise, estime encore le Gouvernement, aura achevé de démontrer "la nécessité d'accélérer la personnalisation des réponses d'accompagnement" ainsi que le développement de solutions de recours. 15 M€ de crédits exceptionnels viendront donc s'ajouter pour aider les structures du secteur handicap à développer des solutions de recours pour les personnes malades du Covid-19 devant être isolées ou en situation de rupture d'accueil au domicile du fait de l'épidémie. Cette enveloppe servira à ce titre à financer l'organisation d'unités Covid au sein des établissements ou en équipes mobiles. 75 M€ seront également délégués pour renforcer en priorité le soutien à domicile, l'accompagnement scolaire et les solutions de répit dans la période de déconfinement.
Annoncé comme un moyen de répondre aux situations d'urgence de crise, le projet 360 Covid bénéficiera quant à lui de 10 M€ (lire notre article). Objectif : la constitution de communautés territoriales dans chaque département. En appui, 35 M€ supplémentaires seront dévolus à la recherche de solutions pour les situations complexes d'ici 2022, dont 15 M€ seront délégués dès 2020.

2020 met la priorité sur les parcours, l'inclusion et l'aide aux aidants
La circulaire budgétaire médico-sociale 2020 permettra le déploiement des Ssiad renforcés et d'équipes mobiles d'appui médico-sociale à l'école, la prime grand âge pour la territoriale et la création de centre de ressources vie affective handicap.
Malgré la crise liée à l'épidémie de Covid-19, le Gouvernement tente de maintenir le cap. Le projet de circulaire budgétaire et huit de ses neuf annexes viennent ainsi dérouler le plan budgétaire des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESMS) pour 2020.
Les Ssiad renforcés déployés dans dix régions
Le Gouvernement prévoit dans ce cadre le financement de modalités d'accueils particulières au titre du parcours de la personne âgée. Le dispositif d'hébergement temporaire en sortie d'hospitalisation lancé en 2019 sera à ce titre poursuivi et financé à hauteur 16 millions d'euros (M€) pour 2020 via le fonds d'intervention régional (Fir) — soit 1 million d'euros (M€) de plus qu'en 2019. "Offre intermédiaire" entre HAD et services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) classiques, les Ssiad renforcés seront quant à eux déployés sur dix ARS en 2020. L'Auvergne-Rhône-Alpes, la Bourgogne-Franche-Comté, la Bretagne, le Centre Val-de-Loire, la Corse, le Grand-Est, la Guadeloupe, la Guyane, les Hauts-de-France et l'Île-de-France se verront ainsi notifier des crédits sur six mois, pour un montant de 1,2 M€ sur le Fir. Une enveloppe qui devrait permettre la création de 20 places en moyenne par région avant un déploiement, en 2021, de la mesure aux autres ARS.
Outre la poursuite de la convergence tarifaire Ehpad (47,1 M€) — sous réserve de ne pas mettre l'Ehpad en difficulté eu égard à la crise Covid-19 — et le versement de la troisième et dernière tranche du dispositif d'infirmiers de nuit en Ehpad (16 M€), une enveloppe de 20 M€, dont la répartition des crédits est encore en cours de finalisation, est octroyée pour le financement du changement d'option tarifaire vers le tarif global. 2020 sera également consacré à l'accompagnement des petites unités de vie (Puv) dans le passage au forfait soins. L'enquête lancée en 2019 sera ainsi poursuivie "afin d'achever sa transformation, de manière pérenne en 2021, dans tous les territoires concernés".
La prime grand âge dans la territoriale
Alors que les professionnels devraient bénéficier de la prime Covid-19, le texte entérine une autre prime : la prime Grand âge, déployée par décret du 30 janvier 2020 aux personnels de résidences autonomie, d'Ehpa et d'Ehpad de la fonction publique hospitalière (lire notre article). Celle-ci devrait ainsi être étendue à la fonction publique territoriale, "selon les règles propres à ces établissements". Un décret similaire à celui de début d'année est ainsi "en cours de préparation". Un décret en Conseil d'État "en cours de préparation" devrait par ailleurs permettre d'assurer son financement sous forme de financements complémentaires. Les services d'aide et d'accompagnement à domicile (Ssiad) verront quant à eux le montant intégré à leur dotation budgétaire.
École et handicap : équipes mobiles d'appui au national
Côté handicap, "la campagne tarifaire 2020 doit permettre le renforcement des modalités diversifiées et personnalisées d'accompagnement [...] ainsi que le développement de solutions de recours", détaille le projet de texte. Et pour cause, la crise, estime le Gouvernement, a assuré "la nécessité d'accélérer la personnalisation des réponses d'accompagnement". Au-delà des enveloppes dédiées à l'accompagnement dans le contexte de Covid-19, l'exécutif place ainsi la priorité sur le soutien à l'école inclusive.
La mise en place des unités d'enseignement externalisées devra être poursuivie avec des efforts portés sur "les différentes formes d'inclusion scolaire d'enfants scolarisés au sein des ESMS". Afin de "structurer la coopération entre les professionnels de l'Éducation nationale et du secteur médico-social dans les établissements scolaires", est également programmé le déploiement dès la rentrée scolaire 2020 "et sur l'ensemble du territoire", d'équipes mobiles d'appui médico-social. Un cahier des charges définitif sera publié "prochainement" sur la base des évaluations des équipes préfiguratrices déployées sur l'année scolaire 2019-2020. À cet égard, 10 M€ de crédits nouveaux seront délégués pour le fonctionnement des équipes pour le dernier quadrimestre de 2020 avant l'allocation de ressources complémentaires en 2021 pour le déploiement du dispositif en année pleine.
En parallèle, 11,1 M€ non répartis en 2019 seront notifiés pour l'appui à la scolarisation de la stratégie nationale Autisme et le déploiement de solutions médico-sociales associées. S'y ajoutent 12 M€ pour "amplifier" l'installation d'unités d'enseignements, d'équipes mobiles et de dispositifs d'autorégulation. 15 M€ viendront par ailleurs soutenir la création ou l'extension de dispositifs d'intervention médico-sociale adaptées aux problématiques croisées de protection de l'enfance et de handicap, à raison de 100 000 € minimum par département.
Diagnostic et centres autisme : un plan "massif"
Plus largement, la stratégie autisme déléguera en 2020 un total de 3 M€ pour le renforcement des plateformes de coordination et d'orientation précoces. L'enveloppe visera la montée en charge sur l'ensemble des régions, ainsi qu'un financement dédié pour les régions n'ayant pas de porteur sanitaire. 8,32 M€, dont 4,8 M€ relèvent de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) handicap et 3,2 M€ de la dotation annuelle de financement (Daf) psychiatrie seront par ailleurs alloués à la mise en œuvre d'un plan "massif" de résorption des demandes de diagnostic dans les centres de ressources autisme. Concentré sur 2020, ce plan intégrera un seuil minimal de 50 000 € par centre.
À noter également la création dans chaque région d'un centre de ressources vie affective intime et sexuelle des personnes en situation de handicap. Destiné aux personnes à domicile ou en ESMS ainsi qu'au service des aidants familiaux et des professionnels, ce nouveau lieu ressources fera l'objet d'un cahier des charges national. Celui-ci devrait voir le jour "au premier semestre 2020" pour un lancement des appels à candidatures et un déploiement dans l'année. Un million d'euros sera réparti entre les ARS sur la base du Fir, conformément à l'annexe 8. Enfin, 10 M€ seront répartis entre les ARS Grand-Est, Hauts-de-France et Île-de-France pour la prévention des départs non souhaités en Belgique.
42,5 M€ pour l'habitat inclusif et l'aide aux aidants
Société inclusive et stratégie d'aide aux aidants comptant parmi les maîtres-mots du Gouvernement, deux axes transversaux aux politiques du grand âge et du handicap ont été identifiés. 25 M€ ont ainsi été débloqués pour 2020 dans le cadre du Fir pour "amplifier le soutien aux porteurs de projets d'habitats inclusifs". Ainsi, environ 400 nouveaux habitats inclusifs sont attendus sur l'année, à raison de deux à six projets par département. En hausse de 10 M€, ces crédits devront au moins financer à hauteur de 2 M€ les projets de vie sociale et partagée d'habitats inclusifs à destination des personnes avec troubles du spectre de l'autisme.
Dans la droite ligne de la stratégie Agir pour les aidants, l'exécutif entend allouer 52,5 M€ sur 2020-2022 pour le développement de l'offre de répit, "parmi lesquelles l'accueil temporaire sous toutes ses formes". 17,5 M€ seront alloués en 2020, dont 12 M€ pour les personnes âgées et 5,5 M€ pour les personnes en situation de handicap. Les ARS disposeront de six mois après parution de la circulaire pour communiquer leur stratégie régionale et leur programmation. Celle-ci devra prendre en compte les opportunités de développement de l'offre de type vacances, offre pour laquelle une enveloppe sera dédiée dès 2021.
Enfin, à noter l'allocation de 13 M€ de financements complémentaires aux dotations régionales limitatives des ARS ainsi que 4 M€ sur le Fir pour le soutien des démarches de qualité de vie au travail.

samedi 23 mai 2020

Le management dans le médico-social (1): en rire?

Billet paru dans les blogs de Mediapart (22/05/2020), par "Docteur BB, Pédopsychiatre en CMPP MONTREUIL"

Dans le champ du médico-social, la gouvernance managériale s'impose de plus en plus, sans égard pour la réalité des pratiques de terrain. Désormais, ce sont des slogans, des mots d'ordre publicitaires qui s'imposent, sans aucune concertation avec les acteurs. Sur la forme, la prégnance de cette mutation idéologique peut faire sourire. Quant aux conséquences sur le fond... 

Suite aux multiples dysfonctionnements des organismes bureaucratiques à l’occasion de la crise sanitaire et dans la continuité du mouvement de résistance contre les réformes imposées aux CMPP par l’ARS Nouvelle Aquitaine, je voudrais proposer quelques illustrations tragi-comiques de la gouvernance managériale sévissant actuellement dans le champ du médico-social…
Certaines tendances peuvent apparaitre tout à fait risibles, si l’on considère les effets de langage et la rhétorique aussi moderne qu’obscure, la conviction illuminée des technocrates, et la dimension pathétiquement comique de leurs innovations disruptives…
Cependant, si l’on prend en considération les effets concrets de ces injonctions managériales, tant sur les équipes de terrain que pour les publics concernés - c’est-à-dire des personnes vulnérables, précaires, en souffrance, entravées par de multiples empêchements – les sourires ne peuvent que se crisper ; et l’on peut légitimement se mettre à ressentir du dépit, de la rancœur, voire un sentiment de colère : ras-le-bol ! Donnez-nous les moyens de travailler dignement et efficacement, ou foutez le camp !
Voici les tendances actuelles dans le champ médico-social :
La politique des ARS consiste désormais à favoriser la gouvernance par des associations gestionnaires de taille importante, en vue d’organiser un management par « appels d’offre ». Il s’agit donc d’en passer par des manifestations d’intérêt pour aller chercher plus d’innovations de la part des offreurs médico-sociaux que sont les associations… En effet, l’idée est de pouvoir mettre en concurrence quelques entités suffisamment dimensionnées pour s’ajuster « à la demande » et s’adapter avec « fluidité » à l’agenda politique prioritaire, à travers notamment la « plateformisation » des dispositifs – et leur désinstitutionalisation…
J’évoque là un autre temps, pré-COVID, en espérant que certaines orientations seront réévaluées à l’aune de la crise - même si l’on peut également craindre une accentuation de ces tendances lourdes, du fait notamment des processus de « dématérialisation » du soin psychique…
Un des CMPP sur lequel j’exerce appartient à une association qui dirige une cinquantaine d’établissements, dans le champ du handicap, de l’enfance et de l’accompagnement familial, ainsi que dans l’accueil des personnes âgées. Cette association reconnue d’utilité publique avait été fondée au tout début du XXème siècle, avec la finalité de soutenir des familles démunies en termes d’intégration sociale. Le nom et le logo associatifs avaient un certain charme désuet, qui provoquait une forme d’attachement affectif spontané – en ce qui me concerne en tout cas…
Oui, mais voilà ; les temps changent, il faut être résolument moderne et audacieux, surfer sur les tendances, et innover…Il y a quelques mois, nous apprenons donc qu’une fusion avec une autre association va avoir lieu. Et puis, nous recevons simultanément, par un hasard du calendrier, deux courriers, adressées à l’ensemble des salariés.
Le premier s’intitule « Découvrez l’identité visuelle de votre association ». On y apprend donc que le regroupement associatif va changer de nom, mais qu’il bénéficiera désormais d’un « logotype conçu afin de créer une identité visuelle forte et capable de faire rayonner notre nouvelle association ». Qu’à travers cette nouvelle identité va se transmettre « sa personnalité et ses valeurs de respect, d’inclusion et d’engagement ». Car, « la typographie allie modernité et émotion, comme gage de qualité, tandis que les nuances de couleurs se diffusent progressivement pour gagner en chaleur en en intensité au fil des lettres ». On en chialerait presque… Comme c’est beau. Enfin, sur le papier, il s’agit, de mon humble point de vue, d’une dénomination qui fait surtout penser à un yaourt au bifidus ou à un service de distribution d’eau courante, avec une stylisation tellement épurée qu’elle flirte avec le vide et l’insignifiance…Bon, il faut dire aussi que la filiale immobilière de l’association – sans lien directe avec le médico-social - était entachée d’une enquête judiciaire ayant bénéficié d’une certaine publicité médiatique, suite à une plainte pour « escroquerie en bande organisée »… Et hop, un petit « renaming » pour tourner la page : nouveau baptême, innocence retrouvée, blancheur immaculée…
Le même jour, donc, nous recevons une deuxième lettre du siège ; que d’amour épistolaire ! Objet du courrier : « dénonciation d’usages ». On y apprend, entre autres, que nous n’aurons plus le droit de nommer un délégué syndical si l’effectif de l’établissement est inférieur à 50 salariés ; qu’en cas de maladie, le maintien de salaire à 100% ne se fera plus au-delà du délai strict prévu par la convention collective ; que la comptabilisation des congés d’ancienneté se fera désormais en jours ouvrés ; que le maintien des congés trimestriels ne sera plus garanti en cas d’absence ; qu’il n’y aura plus d’octroi de jours de congés enfants malades rémunérés…Dans le même temps, un changement de mutuelle d’entreprise est imposé de façon unilatéral, via un courtier en assurance, et le comité d’entreprise ne participe plus à son financement.
Tout cela peut paraitre bien anecdotique, mais la coïncidence est particulièrement troublante…Quelques temps plus tard, nous assistons, médusés, à la présentation officielle par la direction de notre nouvelle identité associative, de notre signature novatrice : « l’audace solidaire ». On nous décrit donc un « rapprochement synergique d’acteurs de référence osant la démarche d’une transformation audacieuse pour donner naissance à un nouvel ensemble d’avenir », avec comme ambition de « défendre la conception d’un monde plus inclusif et bienveillant », à travers une « nouvelle impulsion dynamique ». On nous explique la procédure de « renaming » ayant mobilisé un cabinet spécialisé. Il s’agissait de « créer une belle identité », avec un nom « court, mémorisable, dans l’émotion », associé à un logotype évoquant la fraîcheur et la modernité…En deux mois, 600 noms ont été créés, réduits à 42 pour être présentés à un comité de 7 personnes, en charge du choix définitif ; avec l’ambition d’innover via une formulation synthétique et hardie. Pour couronner la présentation, nous recevons un magnifique kit, avec sac, badge, carnet et stylo, aux nouvelles couleurs de l’entreprise !
De notre côté, sur le CMPP, nous faisions face à des situations cliniques de plus en plus lourdes et, pour en rajouter, nous subissions le départ concomitant de notre directeur administratif et de notre directeur médical. Apprenant que le siège, dans sa politique d’embauche, privilégiait largement le temps de direction administrative par rapport au temps de direction médicale, nous décidâmes en équipe d’écrire un courrier afin de souligner les priorités institutionnelles en termes de soins et notre crainte d’une approche par trop gestionnaire. Visiblement, notre démarche de dialogue fut perçue comme une insupportable ingérence par le siège, comme un abus de pouvoir, et le signe d’une indiscipline déplacée…Et nous fûmes vertement rappelés à l’ordre.
Quelques semaines plus tard, notre équipe est reconstituée avec une nouvelle co-direction administrative et médicale qui semble bien fonctionner. Mais notre directrice administrative souhaite diminuer son temps d’activité, et propose une redistribution en faveur du temps médical. Refus nette du siège : « sinon, ils auraient l’impression d’avoir gagné ! » ; démission dans la foulée de notre directrice, qui ne pouvait envisager de travailler dans ces conditions…Une équipe décapitée, mais audacieuse pour faire face à la situation épidémique !
Il faut sans doute mieux en rire qu’en pleurer… Mais au-delà de la novlangue managériale, les conséquences concrètes sur nos possibilités d’intervenir sont très préoccupantes, à mesure que le modèle entrepreneurial tend à s’imposer de façon plus ou moins insidieuse ou agressive au niveau des institutions soignantes.

jeudi 21 mai 2020

Malgré la crise sanitaire la casse de l'hôpital public continue




Le ministre de la Santé, Olivier Véran, a annoncé le contenu de son ”plan massif pour l’hôpital” (amélioration des rémunérations pour les salariés, réorganisation des soins, programme d’investissement), mais tout laisse à penser que le gouvernement continuera sa politique de casse de l’hôpital public, au bénéfice du privé.

Plan pour l'hôpital : le gouvernement ne change pas de cap

Tarification à l’acte, sous-financement des hôpitaux, plafonnement de l’objectif national des dépenses de l’assurance maladie (Ondam)... En quelques années, l’hôpital public a été mis à l’os. La crise sanitaire liée au Covid-19 a mis crûment en lumière l’ineptie des politiques de santé, menées depuis plus de vingt ans, et la fragilité de notre système de soins. Pourtant, le gouvernement ne change pas de cap.
Ce dernier vient d’annoncer un « plan massif pour l’hôpital », promettant une amélioration des rémunérations pour les salariés, un programme d'investissements, la réorganisation des soins et la revue du temps de travail.
Des promesses bien éloignées des revendications martelées depuis des mois par le personnel soignant : un Ondam à 5 %, l’arrêt de fermetures de lits, une augmentation générale des salaires à hauteur de 300 € pour tous les professionnels qui travaillent dans les établissements de santé et d’action sociale, et la fin de la logique comptable.
Malgré la crise sanitaire et un hôpital rendu exsangue par trente ans de politique gestionnaire, le gouvernement persiste et signe. En avril, le directeur de l'ARS Grand Est annonçait le maintien de la suppression de 598 emplois et 174 lits au CHRU de Nancy.
Pour éteindre l’incendie, le ministre de la Santé Olivier Véran et le Premier ministre Édouard Philippe ont seulement annoncé une « suspension » du plan, renvoyant à des concertations prévues après la crise sanitaire.

Des suppressions de lits, de postes et une privatisation toujours d'actualité

La CGT du CHRU de Nancy, qui a répondu à un appel à mobilisation national le 11 mai, demande l’annulation pure et simple des plans de suppressions de lits et de postes.
À Saint-Etienne, le CHU est lui aussi menacé de restructuration. Jeudi 14 mai, environ 300 soignants du CHU de Saint-Étienne se sont rassemblés pour dénoncer des réorganisations de services et des transferts de lit décidés en pleine crise sanitaire. « Ce passage en force est inadmissible au moment où la catastrophe sanitaire a démontré qu’il est impératif de revoir radicalement les politiques de rationnement budgétaire hospitalier et de fermetures de lits qui étaient jusqu’ici à l’œuvre et que cette restructuration tente de poursuivre, à contre-courant de l’histoire désormais », a déclaré dans un communiqué la CGT du CHU.
En Isère, la privatisation du groupe hospitalier mutualiste menace l’ensemble de l’offre de soin de l’agglomération grenobloise. Le GHMG, un groupe hospitalier privé à but non lucratif, risque en effet d’être cédé à un groupe privé à but lucratif. « On a proposé que la métropole de Grenoble rachète les murs et que le CHU récupère l’activité. Si le groupe Vivalto récupère le groupe mutualiste, c’est la mort de l’hôpital public à petit feu », déplore Damien Bagnis, secrétaire général CGT USD Santé 38.
De son côté, la direction du CHU de Grenoble avance masquée avec un projet « Recomposition de l’offre sanitaire sur le territoire de Grenoble et Voiron » intégrant la création de deux groupements de coopération sanitaire (GCS) de droit privé : de tarification publique pour Grenoble et privé pour Voiron.
Ces GCS, issus de la loi Hôpital, patients, santé, territoires (HPST) seraient pilotés (stratégie, budget, financement) par un conseil d’administration autour d’une gouvernance partagée (50-50) entre le CHU et le groupe de cliniques privés Vivalto Santé et autour d’un modèle fondé sur « un partenariat médical et capitalistique ». Une première en France...
Partout en France les personnels soignants se mobilisent... ils se fixent un rendez-vous toutes les semaines pour exprimer leurs revendications ("les mardis de la colère") dans la perspective de la construction d'un appel unitaire qui pourrait déboucher sur des manifestations pour le 16 juin prochain.

samedi 9 mai 2020

Des masques solidaires pour St Dominique !

Belle initiative dans le Gers, où des citoyennes pallient à la carence des ARS, pour fournir des masques aux soignantes, dont nos collègues de l'EHPAD St Dominique.


 => L'article de La Dépêche


vendredi 8 mai 2020

[Renault Sandouville] Ordonnance de référé

Pour information, l'Ordonnance de référé sur les différentes obligations pour l'employeur dans le cas de l'usine Renault de Sandouville.


mardi 5 mai 2020

Radioscopie du travail sous épidémie

Article sur France Inter

Plus de 30 000 réponses en quelques jours. La branche ingénieurs, cadres et techniciens de la CGT publie aujourd'hui les résultats d'une vaste étude statistique menée en plein coeur du confinement. Objectif : mesurer l'ampleur du séisme vécu par les salariés depuis le 16 mars.

Quelle est l'ampleur du bouleversement provoqué par l'épidémie de Covid-19 et le confinement sur les conditions de travail ? 34 000 salariés, tous secteurs et tous statuts confondus, ont accepté de répondre à un questionnaire en ligne élaboré par la CGT, entre le 8 et le 24 avril. Parmi eux, des travailleurs mobilisés sur sites, d'autres en télétravail, d'autres encore en chômage partiel. On notera que 60% des répondants déclarent ne pas être syndiqués.

Plus d'un salarié sur 2 au chômage partiel a perdu des revenus

Ces témoignages dessinent un panorama global très contrasté et surtout constellé de points d'alerte. Sur la question salariale d'abord : le chômage partiel n'a pas été neutre, explique Marie-José Kotlicki, co-secrétaire de Ugict-CGT : "On imagine parfois que pour les salariés en chômage partiel, la vie est belle. Mais 56% d'entre eux ont perdu des revenus. Plus surprenant : ils sont 31% à affirmer être sollicités par leur employeur pour effectuer des tâches alors même qu'ils sont en chômage partiel. C'est énorme !" Un cadre sur 2 affirme par ailleurs avoir perdu des jours de congés depuis le début de la crise.

Pertes de congés pour la moitié des salariés


Parmi ceux qui n'ont pas pu télétravailler, mobilisés sur le terrain ou dans les bureaux, 93% soulignent ne pas avoir d'autres alternatives que les transports en commun, 66% disent avoir été amenés à manipuler des objets potentiellement contaminés et 39% déclarent manquer de protection suffisantes. 

Encadrement en souffrance, soumis à des pressions et des injonctions contradictoires 

Mais à la peur et au sentiment d'insécurité de ces travailleurs "en présentiel", s'ajoutent les difficultés et tiraillements parfois lourds à porter des personnels encadrants, chefs d'équipe et managers. L'enquête y consacre une place importante. "Il y a un vrai malaise des encadrants très critiques vis à vis des directives de la hiérarchie", note Marie-José Kotlicki. Des encadrants parfois soumis à des pressions, eux aussi sujets à d'importants risques psycho-sociaux.
Un tiers d'entre eux estime que les activités effectuées hors télétravail au début du confinement n'étaient pas essentielles. 62% pensent qu'il a manqué à leurs collègues des gants et des masques en nombre suffisant pour effectuer leurs missions. 10% font état de pressions et consignes venant percuter les principes de précaution sanitaire.

Doubles journées pour les télétravailleuses 

Quant au télétravail, il apparaît bien souvent comme synonyme d'un alourdissement de la charge de travail, une "double peine" même, pour les femmes avec enfants, constate la CGT. Parmi les télétravailleuses, beaucoup affirment s'occuper plus régulièrement de l'école à la maison et travailler régulièrement entre 21 heures et 1 heure du matin lorsque les enfants dorment. Pour 20% d'entre elles, la situation se traduit par des tensions dans le couple, note l'enquête.
"Nous avons eu des témoignages de scènes ahurissantes", précise Sophie Binet membre de la direction confédérale de la CGT : "une femme racontant notamment qu'une de ses collègues avait explosé en sanglots lors d'une réunion en visio-conférence car son enfant, dans la pièce d'à côté pleurait non-stop depuis une demie-heure et qu'elle ne pouvait pas aller le consoler".
Parmi les secteurs où la transition vers le télétravail s'est faite de manière chaotique et "maltraitante" : les banques et assurances, constate Marie-José Kotlicki. "Non seulement les salariés n'avaient pas le matériel adapté, ce qui est étonnant pour ces secteurs, mais nombreux sont ceux qui décrivent une forme de harcèlement et de surveillance continue", détaille la co-secrétaire de l'Ugict-CGT.
À noter que deux tiers des télétravailleurs ne télétravaillaient pas régulièrement auparavant. 78% d'entre eux disent ne pas avoir bénéficié d'un droit à la déconnection. Un tiers ressentent une anxiété inhabituelle et 44% des douleurs physiques, type mal de dos. 

Droit d'alerte pour les personnels encadrants ?

D'où la nécessité, indique la CGT d'évaluations rapides et à tous les niveaux des risques psycho-sociaux engendrés par le confinement. Parmi les propositions du syndicat : la mise en place de négociations systématiques avec les organisations syndicales sur les conditions de reprise de l'activité, des accords d'entreprise sur le télétravail, mais aussi la mise en place d'un droit d'alerte suspensif pour les encadrants, une plus grande indépendance et une meilleure protection des médecins et des inspecteurs du travail.

Pour une CGT à l'offensive, confiante et déterminée, Cédric Caubère (UD CGT 31)




Consignes pour Reprise progressive de l'accueil dans les ESMS

Pour information, les "lignes directrices" envoyée par les ARS le mai pour préparer un plan d'application... le 7 mai !

vendredi 1 mai 2020

UD CGT 81 : "Confiné mais pas muselé !"

1er mai 2020 - Cortège de la CGT ANRAS en chanson

Confiné.e.s mais pas isolé.e.s ! Les camarades ont répondu présent.e.s pour cette manifestation virtuelle !
Des EHPAD aux MECS en passant par les ITEP, IME... on est là ! Et le "le jour d'après, on y sera"


[EDIT 18h00 - Alors que plusieurs camarades étaient en retard ou ont été motivé en voyant le projet, on a fait une version plus complète sur Youtube]
Version 1