mardi 2 juin 2020

Coronavirus : un bilan tragique pour les MNA

Bilan de Médecins du Monde et Médecins sans Frontières, publié sur le site de Médecins du Monde :

En pleine crise sanitaire, nos organisations médicales humanitaires tirent le constat alarmant de l’abandon par les conseils départementaux des adolescents en procédure pour faire reconnaitre leur minorité et leur isolement. L’hébergement, l’accès aux soins et à la nourriture de ces mineurs ont plus que jamais reposé sur l’engagement des associations et collectifs citoyens, sans qu’aucune protection adaptée ne leur soit proposée par les pouvoirs publics.

Coronavirus : un accès aux soins pour les mineurs non accompagnés garanti par les associations
En pleine pandémie, l’accès aux soins de santé et à la prévention de ces jeunes mineurs non accompagnés a été garanti par les associations. Du 15 mars au 15 mai à Paris, Médecins sans frontières (MSF) et Médecins du Monde (MdM) ont réalisé près de 400 consultations médicales et plus de 730 consultations psychologiques, en partenariat avec le COMEDE, auprès de mineurs non-accompagnés (MNA) en recours. Partout, le refus de reconnaissance de leur minorité par les conseils départementaux a servi de prétexte aux autorités pour se renvoyer la balle au détriment de leur santé. En résultent de nombreux signalements par nos deux associations auprès des autorités départementales et judiciaires compétentes concernant des risques sanitaires, somatiques ou psychologiques. Alors que les signalements auprès des conseils départementaux sont restés sans effet, la justice, saisie par les associations, s’est prononcée pour le placement et la protection de plus de 70 mineurs à Paris.

Des mineurs non accompagnés ignorés par l’Etat qui doit les protéger
En dépit des risques sanitaires avérés et des alertes répétées, aucun hébergement digne et adapté n’a été proposé aux MNA en procédure. Médecins sans frontières a ainsi financé la mise à l’abri en hôtels de plus de 170 d’entre eux à Paris, Bordeaux et Marseille. A Paris, 107 autres mineurs auraient passé le confinement à la rue sans l’intervention des hébergeurs solidaires et des associations Paris d’Exil, TIMMY – Soutien aux Mineurs Exilés, les Midis du MIE, La Casa et Utopia 56. Cette dernière a également hébergé une cinquantaine de mineurs à Rennes et à Tours. Dans le même temps, et dans plusieurs villes de France, les hébergements concédés par les pouvoirs publics ne l’ont été qu’après que des avocats et associations aient eu à saisir la justice. A Paris, l’unique solution d’hébergement proposée l’a été après six semaines de confinement, dans un gymnase, inadapté aux consignes sanitaires, et pensé comme un sas pour réorienter ces mineurs vers les dispositifs pour adultes en situation de précarité. Ainsi, malgré les effets d’annonce, ce sont des centaines de mineurs qui sont restés à la rue en pleine crise sanitaire, en dépit des consignes de confinement.
« A Paris, plus de 7 300 repas ont été distribués aux MNA durant le confinement. »
L’accès à la nourriture des mineurs non accompagnés en recours a également été laissé à la charge des associations.
Dans la seule ville de Paris, Médecins sans frontières et Médecins du Monde ont accompagné 260 mineurs en recours sur les plans médical, psychologique, juridique et social durant la période du confinement, auquel s’ajoutent la centaine d’autres suivie par les autres associations.
En dépit des annonces d’Adrien Taquet, Secrétaire d’État chargé de la protection de l’enfance, le 22 mars 20201, nos associations de terrain2, ont constaté qu’une fois encore, les mineurs non accompagnés en recours ont été ignorés par les départements à qui il incombe pourtant de les protéger.
Alerter sur la situation dramatique des mineurs non accompagnés en France
Depuis de nombreuses années pourtant, nos organisations, en lien avec d’autres associations et collectifs citoyens sur le territoire, ne cessent d’alerter sur la situation dramatique des mineurs non accompagnés pendant la phase du recours. Ces alertes ont été renouvelées pendant le confinement auprès des conseils départementaux et, compte tenu de la dimension sanitaire, auprès de la Direction Générale de la Santé, d’Agences Régionales de Santé et du Conseil scientifique Covid-19 sans trouver d’écho ni de résolution.​
Les personnes se déclarant mineures et isolées doivent être considérées comme des enfants en danger et donc être protégées comme tels jusqu’à la décision judiciaire définitive se prononçant sur leur situation. Cela doit avant tout se traduire par une véritable politique d’accueil dès leur arrivée en France, reposant sur un temps de répit et de soins dans le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant.
Ces demandes ne sont ni nouvelles ni inatteignables : elles constituent le simple respect de la loi française et de la Convention internationale des droits de l’enfant dont la France est signataire. Les conseils départementaux sont responsables des mineurs non accompagnés. Il est temps que cette responsabilité soit pleinement assumée.
Médecins du Monde a ouvert en 2016 à Paris, Nantes et Caen des programmes dédiés aux mineurs non accompagnés en attente de la reconnaissance de leur minorité et isolement, leur proposant des consultations médico-psycho-sociales et un accompagnement dans l’accès à un parcours de soins. En 2019, l’association a reçu près de 2 000 MNA sur l’ensemble de ses programmes en France.
Médecins sans frontières est une association médicale humanitaire internationale créée en 1971 par des médecins et des journalistes. A Pantin (Seine Saint-Denis), Médecins Sans Frontières a ouvert, en 2017, un centre d’accueil et d’orientation autour de pôles infirmier, santé mentale, juridique et social, qui a accueilli plus de 1 600 jeunes depuis son ouverture. Un centre d’hébergement de 36 lits à Neuilly Plaisance (Seine Saint-Denis) accueille depuis août 2018 des jeunes avant leur placement dans les familles d’hébergeurs solidaires du réseau « Accueillons ». Au total, depuis 2018, près de 400 mineurs non accompagnés ont été hébergés avec un suivi pluridisciplinaire (juridique, médical, social, psychologique) par Médecins sans Frontières et près de 1 000 mises à l’abri d’urgence ont été financées.

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